Résumé
Les clinicien·nes dépendent de l'oxymétrie de pouls et des alarmes médicales auditives pour surveiller les patient·es et améliorer leur sécurité. Cependant, les alarmes peuvent être fatigantes, peu informatives et inopérantes. La recherche sur la perception musicale et la cognition peut contribuer au développement des alarmes afin d'atténuer la fatigue des alarmes et d'améliorer le suivi des patient·es dans un environnement cognitif exigeant.
Les alarmes des unités de soins intensifs et des salles d'opération se déclenchent fréquemment et, dans 85 à 99 % des cas, ne nécessitent pas d'intervention clinique. À mesure que la fréquence des alarmes augmente, les clinicien·nes développent une « fatigue des alarmes » qui se traduit par une désensibilisation, des alarmes manquées et des réponses retardées. Cette situation est dangereuse pour les patient·es lorsqu'un événement provoquant une alarme nécessite une intervention clinique mais est manqué par inadvertance. La fatigue liée aux alarmes peut également amener les clinicien·nes à régler les paramètres d'alarme en dehors des plages efficaces pour réduire l'occurrence des alarmes, à réduire le volume des alarmes à un niveau inaudible, à faire taire les alarmes souvent insignifiantes et à être incapables de distinguer l'urgence des alarmes. Comme les taux de fausses alarmes et d'alarmes cliniquement insignifiantes atteignent 80 à 99 %, les praticiens se méfient des alarmes, perdent confiance en leur importance et manifestent une certaine lassitude à l'égard des alarmes. Pourtant, l'absence de réponse à une alarme cliniquement significative, peu fréquente, peut conduire à de mauvais résultats pour les patient·es.
Étant donné la faible valeur prédictive positive des alarmes, les patient·es ont souvent une mauvaise perception des soins en fonction de la réponse du·de la clinicien·ne aux alertes et aux alarmes. Les recherches en cours montrent les avantages de l'intégration multisensorielle (haptique/auditive) pour améliorer la perception des alarmes, l'extraction du signal acoustique de l'alarme de l'environnement du·de la patient·e, la sonification des données physiologiques pour que le·la clinicien·ne puisse réagir de manière proactive, et le rôle multidisciplinaire de l'ingénierie, de la psychologie, de la perception musicale et de la cognition, et des sciences de l'audition et de la parole dans le développement d'appareils pour améliorer la sécurité des patient·es.
Biographie
Joseph Schlesinger est professeur au département d'anesthésiologie et à la division de médecine des soins intensifs du Vanderbilt University Medical Center, professeur de musique à la Blair School of Music de l'université Vanderbilt et professeur auxiliaire d'ingénierie électrique et informatique à l'université McGill de Montréal, au Québec, au Canada. Après avoir obtenu une licence en musique avec une spécialisation en piano jazz à l'université Loyola de la Nouvelle-Orléans, Dr Schlesinger a obtenu un doctorat en médecine à l'université du Texas Health Science Center de Houston. Il a effectué un internat en anesthésiologie suivi d'un stage en médecine des soins intensifs à l'université Vanderbilt. Pendant sa formation, le Dr Schlesinger est devenu boursier B.H. Robbins. Les recherches du Dr Schlesinger portent sur l'intégration multisensorielle, les facteurs humains, la perception auditive, la précision temporelle, le développement d'alarmes, la surveillance des patients et la formation médicale. Ces travaux lui ont valu le prestigieux prix 2014 Education Specialty Award de la Society of Critical Care Medicine. Il a été financé par la province de Québec, le ministère de la défense et les National Institutes of Health, et a fait partie des sections d'étude de la National Endowment for the Arts et de la National Science Foundation. Outre ses publications dans des revues scientifiques à fort impact, le Dr Schlesinger est un inventeur breveté et a été présenté dans le podcast « 99 percent invisible », CNN Health, WIRED, NPR (The Pulse - WHYY), Scientific American et le New York Times.